mardi 24 janvier 2012

Les nouveaux pirates

Les nouveaux pirates,
linogravure de Benjamin Baret

    Beaucoup d'Etats viennent de déclarer une guerre sans merci contre les hackers,  représentés par les Anonymous. Ainsi, de nombreux cyber-pirates se sont faits arrêter et condamner à de lourdes sanctions. Mais quels actes atroces qu'ils ont bien pu accomplir pour être considérés comme des voleurs barbares?

Internet, un nouveau monde en construction

    Internet était jusqu’alors un continent très nouveau, donc peu censuré, majoritairement utilisé par les jeunes, contrairement à la politique. Les grands oligarques sexagénaires du globe ont voulu utiliser le pouvoir d’internet : ils ont fait des sites d’« utilité publique », des magasins virtuels, contenant des données très importantes. Malheureusement, la jeunesse anonyme contrôle mieux qu’eux ce nouveau monde ! Elle a cartographié son territoire, créé de nouvelles embarcations plus solides, plus rapides et moins détectables. Cette jeunesse a su tisser sa propre toile, fabriquer son propre monde. Et puis elle s’est constituée une véritable bibliothèque d’Alexandrie gratuite nommée Megaupload, gratuite et gigantesque. N’ayant pas les moyens d’accéder à la culture bien trop chère présentée dans le monde réel (comprenez financier) dans lequel elle vit, elle a étanché sa curiosité par les moyens qu’elle a trouvé.

    Oui mais ce nouvel espace virtuel n’appartient pas vraiment à quelqu’un. Il se situe en marge du monde réel. Certains hackers connaissent très bien le fonctionnement de cet univers, ils peuvent contrôler ce qu’il s’y passe, transformer ce qu’il s’y trouve, etc… Et les gouvernements n’ont pas le pouvoir absolu sur ce nouveau média. Les idées subversives peuvent y être diffusées librement, ce qui a entrainé le « printemps arabe », « l’été espagnol », « l’automne américain ».


Les bateaux-pirates des Anonymous

    Certains pirates se sont rassemblés, organisés, politisés. Ils se sont appelés Anonymous, et ont démontré leur puissance grâce à des actes virtuels incroyables: ils ont détourné de l’argent du ministère de la défense américaine au profit d’associations caritatives, ils ont diffusé des données strictement confidentielles de certains des plus grands oligarques, etc...
    Hackers signifie pirates. Les pirates peuvent être définis comme volant aux riches pour se donner à eux-mêmes. Mais les Anonymous ne sont pas intéressés par les richesses personnelles! Ce sont des robin-des-bois ! Ils volent aux riches pour donner aux pauvres, ils transgressent les règles pour faire passer un message.
    Malheureusement, le monde réel les a rattrapé. Les états ont déclaré la guerre aux téléchargements, ils ont fermé et brûlé la grande bibliothéque du web. Ils ont enfermé quelques cyber-activistes (dont un gamin de 15 ans en France). Ils ont voulu faire passer des lois tyranniques obligeant les fournisseurs internet à bloquer les sites ne respectant pas les « droits d’auteur » (Google, Youtube, Facebook, etc.). Ces lois sont soutenues par les grandes maisons de disques, l’industrie du cinéma, et autres maisons d’édition ou grands distributeurs.

Les vrais pirates

    Qui sont donc ces pirates ? Regardez un peu mieux ! Qui vole à la fois aux artistes et aux consommateurs ? Qui se fait des marges inadmissibles sur les produits culturels ? Vous y êtes ! Les grandes maisons de disques, l’industrie du cinéma, certaines maisons d’édition ou grands distributeurs. Voici quelques graphiques représentant la répartition de l’argent dépensé par le consommateur pour de la musique ou des livres.














    



Malgré le peu d’argent gagné par les artistes sur la vente de leurs œuvres, certains amassent tout de même des fortunes considérables grâce aux moutons guidés par les modes. Lady Gaga a ainsi ouvert un supermarché ne contenant que les produits de sa marque.

    Il y a également les pirates sévissant sur le marché spéculatif de l’art ou l’industrie du cinéma. Et puis les droits d’auteurs non réclamés à la SACEM (souvent par des artistes peu connus) reversés aux artistes qui gagnent le plus, le problème du statut d’intermittent du spectacle, etc…

    Ne venez donc pas nous dire, chers politiciens, que la fermeture de Megaupload ou bien les lois anti-téléchargements ont pour but de protéger les artistes. Croyez-vous que le peuple est assez bête pour ne pas comprendre qui vous protégez en voulant conserver ce système de diffusion de la culture qui remplit beaucoup de poches?



    Certes, le téléchargement gratuit n'est pas normal, car l'oeuvre ainsi récupérée ne rapporte absolument rien à l'artiste qui l'a créé. Mais les parasites qui s'octroient des marges hallucinantes sur la vente finale d'une oeuvre alors qu'ils ne sont que des intermédiaires sont au moins tout aussi blâmables.
    Il s'agit pourtant de l’accès à la culture, du droit d'un artiste à jouir pleinement des fruits de son travail, de la libre diffusion des idées. Rien de moins.


Un article de Benjamin Baret

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